Angoulême 2025…

Il est donc temps de vous parler en détail de ce Festival international de la bande dessinée d’Angoulême. Il fallait, pour cela, d’une part qu’il soit terminé et que je sois rentré chez moi et, d’autre part, que je puisse prendre un peu de recul pour mettre en place un regard sinon objectif au moins dépassionné…

La première chose importante à préciser concerne l’article paru dans l’Humanité, repris dans ses grandes lignes dans Libération, concernant un viol qui a été commis lors du Festival 2024 sur Chloé tels que les faits sont rapportés par la journaliste de l’Humanité. La victime qui travaillait pour le festival a été licenciée pour comportement inapproprié ce qui est, tout simplement, hallucinant. Ce n’est pas à moi de faire l’enquête ni le procès, mais vous comprendrez bien que cette « affaire » était dans l’esprit de beaucoup au moment de l’ouverture du festival.

Mais les articles concernant le festival ne se limitaient pas à ce viol. Soyons très objectifs, on reproche à l’organisation du festival une mauvaise gestion, un manque de transparence, un manque d’humanité dans les relations humaines internes, une augmentation des tarifs, un sponsoring surprenant avec un leader du fastfood, un népotisme confirmé… Bref, on pourrait dire : La coupe est pleine !

Ceci étant, a-t-on les preuves factuelles de tout cela ? Car, quand on accuse, il faut pouvoir prouver ! Je ne suis pas le juge d’instruction, je n’ai pas tous les éléments en mains, mais, quelques faits ont retenu mon attention et je voulais les partager avec vous…

Tout d’abord, mercredi matin, en arrivant à Angoulême pour la journée pro, j’ai discuté avec une professionnelle intervenant pour le festival. Sous couvert d’anonymat, nous avons abordé ce dossier et je voulais savoir ce qu’elle en pensait. Réponses très claires et je vous les livre : Oui, j’étais informée du viol depuis presque un an car après le Festival de l’année dernière j’ai discuté avec la victime et elle m’avait raconté les faits. Elle était un peu perdue et cherchait de l’aide qu’elle ne trouvait pas auprès de sa hiérarchie.

Le soir, lors de l’ouverture, aucun partenaire n’a réellement pris la parole et les mots du maire furent plus que succincts. Une sorte de service minimal et ce fut assez lourd comme ambiance. On peut d’ailleurs dire que l’accueil de Posy Simmonds, Grand Prix 2024, et Anouk Ricard, Grand Prix 2025, fut assez anodin et, du coup, triste. Ces grandes autrices auraient mérité bien mieux !

Anouck Ricard

J’ajoute un autre fait lors de cette soirée. Posy Simmonds devait annoncer le Grand Prix 2025. Elle était au micro et ne connaissait pas le résultat du vote. Pas d’enveloppe, pas d’huissier, la directrice artistique du festival lui a juste glissé le nom à l’oreille. On voudrait créer du doute autour du vote que l’on ne s’y prendrait pas autrement…

A partir de ce même jour d’ouverture, un certain nombre de communiqués se sont succédés provenant des éditeurs indépendants, des grands éditeurs, du Festival, de certaines associations… A chaque fois, on se sentait de plus en plus mal car le dossier à charge semblait bien rempli… On aurait pu se dire que le Festival était définitivement plombé et qu’il n’y avait plus qu’à rentrer à la maison avec tristesse… Heureusement, ce ne fut pas le cas…

De nombreux acteurs de la bande dessinée ont courageusement exprimé leurs positions face à cette situation, et, malgré le tarif de plus en plus élevé, malgré les évènements payants de plus en plus nombreux (master class, concerts dessinés…) ; le public a été présent au rendez-vous de ce Festival !

Heureusement, aussi, quelques prix sont venus récompenser des auteurs, autrices et ouvrages que j’avais eu plaisir à lire et à défendre… J’en retiendrai trois qui me tiennent à cœur ; le Prix des lycéens attribué à Marie Bardiaux-Vaïente et Carole Maurel pour Bobigny 1972, le prix Goscinny du meilleur scénariste à Serge Lehman pour Les navigateurs, le Fauve spécial du Jury pour Les météores de Jean-Christophe Deveney et Tommy Redolfi…

Lors de ce festival, j’ai visité 6 expositions, réalisé 30 interviews, reconstruit le monde deux ou trois fois, rencontré des amies et amis, et donc pris beaucoup de plaisir. Il y aura eu, avouons-le, un petit goût amer déposé en moi qui n’est probablement pas prêt de partir…

Une idée de cadeau à faire sans hésitation…

Puisque nous venons de vivre à Chalon-sur-Saône, avec l’Espace des arts, un focus spécial « Victor Hugo », il me semblait judicieux, pour ceux qui voulaient prolonger cette immersion hugolienne, de signaler que le grand dessinateur de bandes dessinées, Georges Bess, venait de terminer sa version de « Notre-Dame de Paris », un chef d’œuvre qui vient prendre place dans nos bibliothèque aux côtés de son Dracula et de son Frankenstein… Trois belles idées de cadeaux en cette période de fêtes !

Les batteurs de pavès sur le pavé chalonnais…

Quel beau moment que de vivre « Les misérables » en compagnie des Batteurs de pavés. Certes, Victor Hugo n’est pas mon auteur préféré, mais revisité ainsi, il n’y a aucun obstacle au plaisir du plus grand nombre…
Car, soyons lucides, ce théâtre de rue plait. Une heure avant le spectacle la place du cloitre de Chalon-sur-Saône est déjà presque saturée, pleine comme un œuf ! Malgré quelques gouttes de pluie lâchées par le ciel pour rafraichir l’atmosphère ; bien que le soleil sesoit immédiatement invité pour prendre le relais de la pluie ; nonobstant les fesses des festivaliers posées sur un bitume agressif… le public était là et y restait, dans le calme et la sérénité ! On peut parler de l’impatience des Français mais, là, magnifique contre-exemple !
Pour ceux qui connaissent un tant soit peu « Les misérables », deux questions restent en suspens : comment jouer cet énorme roman en une heure ; comment incarner tous les personnages en n’étant que deux acteurs ? En fait, les réponses arrivent très vite. D’abord sur le contenu, on va se limiter au strict minimum et quand bien même ça ne suffirait pas, par une ou deux pirouettes bien trouvées, les Batteurs de Pavés passeront à la suite sans perdre trop de spectateurs…
Enfin, pour le nombre d’acteurs, une bonne douzaine de personnes du public se joindront aux deux acteurs pour renforcer la distribution… Et je ne compte pas l’ensemble du public qui joue admirablement le Peuple de Paris en colère !
Le compte y est, « Les misérables » furent bien donnés avec succès à Chalon dans la rue 2023 par Les Batteurs de pavés !!!
Alors, cette pièce de rue fut-elle fidèle à celle qu’aurait pu écrire Victor Hugo en s’inspirant de son roman fleuve ? En fait, mauvaise question car une adaptation est toujours une trahison, sans aucun doute ! Par contre, Les Batteurs de pavés savent nous embarquer dans leur délire et nous finissons par trouver leur version comme la plus crédible !
Enfin, crédible mais sans que l’on sache bien le niveau de cette crédibilité… Il y a des limites à tout !

Les Grooms toujours là dans Chalon dans la rue 2023

Un spectacle à voir ? Il y en a beaucoup dans ce Chalon dans la rue 2023, mais je vous pousserais bien à découvrir une nouvelle version de l’histoire de Don Quichotte de Cervantès… Celle des Grooms !
En quelques mots clairs et précis, on peut dire qu’il s’agit d’une comédie musicale de rue pour fanfare et 3 chanteurs, inspirée par Cervantès et adaptée pour l’époque agitée que nous vivons.
Un spectacle de grande tenue musicale, très bien maitrisé dans l’espace urbain, avec le renfort de l »ensemble vocal Musique pluriel de Chalon sur Saône…
Une heure d’un spectacle intense qui donne envie de relire Don Quichotte de Cervantès et peut-être de reprendre certains combats dans notre société… Sans illusion quand même, Don Quichotte oblige !

Premier jour de Chalon dans la rue 2023

Hier soir, première soirée de Chalon dans la rue 2023, j’ai eu le plaisir de voir et écouter la compagnie Oposito dans son spectacle « Peaux bleues ». Une énergie incroyable, des messages plein d’humanisme et d’universalité, une adhésion remarquable du public… Bref, un très beau moment pour entrer en festival !
C’est l’histoire d’un groupe musical « Peaux bleues », constitué de femmes et d’hommes aux horizons multiples… Ils sont d’abord le fruit de cultures différentes et ilsont intégré toutes celles qu’ils ont croisées. Ils jouent, chantent et dansent toutes les formes musicales possibles, avec tous les instrument possibles, à commencer par la voix, instrument absolu !
Ils affichent leurs valeurs, celles de l’égalité des chances, du droit de faire exister sa différence. Ils les chantent sans limite, sans hésitation, sans concession. Et le public est séduit et adhère au message avant tout esthétique et artistique…
Un très beau spectacle !

Une exposition jeunesse…

Si vous êtes à Paris avant le 15 juillet, si vous avez envie de rêver et de vous replonger dans l’univers de la Famille Passiflore… La galerie Daniel Maghen est fière de consacrer une rétrospective à un artiste incontournable de la littérature jeunesse, Loïc Jouannigot, l’auteur de La Famille Passiflore, du 16 juin au 15 juillet 2023.
Si vous avez des enfants, c’est aussi l’occasion de leur montrer ce qu’est une illustration avant de prendre sa place dans un livre… Cetteexposition retracera 40 ans de travail pour les jeunes lecteurs !
Galerie Daniel Maghen
36 rue du Louvre
75001 Paris
Du Mardi au Samedi
de 10h30 à 19h00

Une vente aux enchères d’originaux BD…

Je n’ai pas les moyens de m’offrir actuellement une planche originale de bande dessinée… Pourtant, une planche originale d’une série que j’aime (et il n’en manque pas !) aurait fière allure dans ma salle à manger (oui, dans les autres pièces, il n’y a plus de place à cause des livres !)… Une planche de Blake et Mortimer, de Blueberry, de Largo Winch, de Cubitus… Oui, mais voilà, ce n’est pas ma priorité pour le moment !

Alors, pourquoi vous parler de vente aux enchères de bande dessinée ? Pourquoi annoncer la prochaine vente du 14 juin à la maison d’Amérique latine à Paris organisée par Daniel Maghen Enchères ?

La question mérite de véritables réponses et je vais tenter de vous expliquer cela.  Pour moi, il y a trois bonnes réponses à ces questions. La première est simple, c’est bien une information touchant à l’univers de la bande dessinée et même si je ne suis pas candidat à l’achat, je peux imaginer un collectionneur ou grand amateur qui a envie de s’offrir une planche ou un dessin de Gibrat, Vance, Tezuka ou Bar2… Tout ne sera pas hors de prix, d’ailleurs, et certaines estimations avant vente laissent envisager des planches originales à moins de 5000€. Alors, là, je ne parle pas de la planche originale d’Astérix en Hispanie, la n°7 dessinée par Albert Uderzo en 1969 qui est estimée entre 130000 et 150000 € ! Il faut savoir rester réaliste et modeste…

Mais, si vous n’avez pas les moyens de vous offrir ces folies, même les plus modestes, il existe quand même un point à ne pas oublier et ce sera ma deuxième réponse, pouvoir acheter un catalogue de la vente aux enchères. Daniel Maghen propose trois ouvrages (ce sont de véritables objets collectors) pour cette vente, trois livres avec des reproductions d’une très grande qualité qui permettent de voyager dans l’univers du neuvième art. Le premier, Bande dessinée & illustration, vous propose la vente générale, avec, entre autres, la fameuse planche d’Astérix (35€). Le second, Bar2, entièrement consacré à des illustrations concernant Joe Bar Team (30€). Le troisième, Gabrielle Vincent, entièrement consacré à Ernest et Célestine (30€). Ces trois ouvrages, je crois que l’on peut l’affirmer, sont indispensables dans toute bibliothèque de bédéphiles… Enfin, c’est mon avis et c’est beaucoup plus accessible qu’un original !

Enfin, troisième réponse ou élément d’appréciation, cette vente montre comment Daniel Maghen accompagne les auteurs au moment où l’on parle de questions de statuts, de revenus, de considération de auteurs de bande dessinée… Daniel Maghen veut que les auteurs puissent vivre de leur travail et pour cela il souhaite qu’en plus de leur revenu directement lié aux albums, ils puissent vendre dans de bonnes conditions leurs originaux ! Ce serait à eux, ces auteurs, de donner leur avis mais j’en ai déjà entendus plusieurs être satisfaits des choix faits par Daniel Maghen… A suivre !

(https://www.danielmaghen-editions.com/ )

Exposition Alfred à Francheville !

Il y a des auteurs que l’on a l’impression de connaître depuis toujours, puis quand on regarde d’un peu plus près, on est obligé de constater que le « depuis toujours » n’est pas aussi long qu’aurait pu le penser… C’est le cas pour moi avec le bédéiste Alfred !

Bon, si je prenais le temps de regarder sa date de naissance, 1976, je serais bien obligé de limiter quelque peu le « depuis toujours ». Mais, en fait, même si ma première rencontre doit dater de 2000 avec le premier volume d’Abraxas, j’ai quand même le sentiment d’une grande présence car nombreux sont ses albums qui m’ont interpellé, fasciné, réjoui, enchanté… Abraxas, Octave, Pourquoi j’ai tué Pierre, Le désespoir du singe, Je mourrai pas gibier, Come prima, Capitaine Fripouille, Senso…

Autant de beaux livres, de belles rencontres, de belles interviews, de belles discussions y compris hors du champ professionnel… Beaucoup de très bons souvenirs !

Aussi, quand j’ai appris que la médiathèque de Francheville organisait une grande exposition rétrospective du travail d’Alfred, avec de nombreux originaux, je me suis dit que cette information méritait d’être partagée :

-       Une grande exposition rétrospective de l’œuvre d’Alfred,  » Intima Commedia », du 7 juin au 28 juillet.

-       Une séance de dédicace avec Alfred, le mercredi 7 juin, 15h à 16h30 (sur inscription et tirage au sort si besoin).

-       Une soirée spectacle, concert dessinée avec J-P Nataf (gratuit mais sur inscription).

Voilà, le message est passé et, pour ma part, je vais aller visiter cette exposition dont je reviendrai vous parler très vite !

Médiathèque de Francheville

1 montée des Roches – 69340 Francheville

Par téléphone : 04 37 23 68 37
Par mail : mediatheque@mairie-francheville69.fr

Les Utopiks, Le théorême du pissenlit

Le festival des Utopiks qui est entrain de se terminer pour sa version 2023 fut un temps fort ouvert à toutes et tous, de 0 à 110 ans comme le disent ses organisateurs en parodiant avec talent le slogan du Journal de Tintin…

Le premier spectacle que j’ai pu voir durant ce festival a été « Le théorème du pissenlit ». Ce texte de Yann Verburgh mis en scène par Olivier Letellier et interprété par Les tréteaux de France-CDN, permet au spectateur quel que soit son âge (spectacle conseillé à partir de 9 ans) de prendre la mesure du travail des enfants dans le monde… En sortant, chacun se demande où a été fabriqué son Jean, son sweat, son dernier jeu vidéo, sa tondeuse ou que sais-je… Où et par qui ? Avec des enfants ou pas…

Mais avant d’arriver au questionnement individuel et chacun le mènera à sa guise, la pièce nous accompagne à la rencontre de plusieurs personnages, Tao, Li-Na et un charmant petit garçon qui fête son anniversaire… Il n’y aura pas de jugement jeté à l’emporte pièce, de morale de comptoir ou de leçon assénée à tout bout de champ… Une histoire, une simple histoire, que chacun comprendra à la lumière de sa vie, de ses expériences, de ses connaissances… Et, comme le partage des émotions et des ressenti est encore plus riche à chaud, à la fin du spectacle, acteurs, metteur en scène et spectateurs ont pu discuter sans compter et limiter le temps…

Un récit oral à plusieurs voix mais pas que… Cette histoire prend forme dans un très beau décor et les acteurs exécutent aussi une sorte de chorégraphie de qualité sur une bande musicale sympathique, rythmée et narrative elle-aussi… Et je n’oublie pas ces pissenlits qui passent et repassent… qui volent et qui roulent… qui nous emmènent au bout du monde !

Une très belle soirée !

J’ai particulièrement apprécié les personnages adultes de la pièce car il était facile pour moi de voir en chacun d’eux une partie de moi… Et oui, nous ne sommes ni blanc, ni noir mais un peu des deux selon le moment, selon les circonstances, selon le lieu… Un père de famille, un élu, une journaliste, une enseignante… Personne n’est entièrement responsable mais tous un peu complice malgré tout… Non ?

Maintenant, à nous de jouer !

Tellement inclassable…

Un spectacle surprenant et totalement hors des normes habituelles… Indiscutable !

Un moment fort et intense qui prend le public et l’interroge sans jamais lui imposer quoi que ce soit… Certitude !

Un concert en live de musique « incomplète », pour reprendre le mot du compositeur, qui offre la possibilité à tout un chacun de devenir, ne serait-ce qu’un instant, co-compositeur d’une symphonie métaphysique extraordinaire… Créatif !

Une parenthèse humaine qui pose des grandes questions existentielles sans les jamais les galvauder, sans prendre les spectateurs pour des abrutis limités, sans vouloir les enfermer dans un système ou une idéologie… Libre !

Si le spectacle a pour objectif de nous inviter à contempler les invisibles pour, peut-être, les apprivoiser, alors c’est réussi ! Quant à l’apprivoisement, là, chacun verra ce qu’il pourra faire en fonction de sa vie, de son expérience, de sa culture…

Merci Nihil Bordure pour cet évènement artistico-métaphysico-humain… et aussi bravo à l’Espace des arts d’oser programmer ce genre de spectacle inclassable !