Etoile polaire de Julien Miavril

Etoile polaire de Julien Miavril

Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie

Critiqué par ABartist, le 31 août 2024 (Inscrite le 31 août 2024, 29 ans)
La note : 10 étoiles
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Recension du recueil "étoile polaire"

Étoile polaire, le choix de ce titre est ingénieux et ambitieux. Ingénieux, car, irradiant la couverture, l’illustration de l’étoile polaire interpelle celui ou celle qui se tient devant l’ouvrage avec ses huit faisceaux de lumière, telle une boussole. Ambitieux, car le poète, Julien Miavril, propose de se faire guide pour son lecteur et propose un voyage poétique.

En effet, le poète se fait guide dans le partage de son expérience spirituelle, il aspire à enseigner, à transmettre ses acquis tel un éclaireur en s’adressant directement à son lecteur: « J’ai prié du bout des lèvres/ Mesure/ Admets/Empoigne/Va/Plonge/ Et offre à Dieu ta plus belle et plus pure prière/Ainsi, va là où nul n’est encore jamais allé ». Le poète va jusqu’à assumer clairement ce rôle « Chaque poème de ce recueil délivre ainsi un enseignement spirituel » .

Le poète témoigne ainsi de son expérience dans un style élégiaque et romantique «La sagesse se conquiert souvent dans la douleur / Ce que tu perds aujourd’hui, n’en fais pas la conquête ».

Le recueil se décline d’abord en deux parties, la lumière n’a pas d’âge et éclats de l’amour, mais nous verrons qu’amour et lumière sont ici liés. Ce diptyque est imprégné de références bibliques et invite à penser l’amour avec le divin. « Ma Dame est mon Église, d’Amour elle irradie ». Ces poèmes rappellent l’œuvre de Dante Alighieri :« La Divine Comédie » , « Nous nous sommes préparés à retrouver notre Béatrice et à toucher Dieu au moment d’embrasser ses lèvres » « Je suis descendu aux enfers ».

En embarquant avec le poète dans cette quette poétique, la notion de recherche est souvent employée, à la fois dans la quête de l’être aimé et du secret divin « Si tu cherches un secret renonce à le connaître » , «  Je te cherche ». Le poète légitime subtilement son rôle de guide par le partage de son expérience.

À la lumière d’anciens poètes, la thématique de la nuit a été explorée avec l’étude des astres chez Baudelaire et Victor Hugo. Le poète propose ici une remise au goût du jour novatrice avec une mise en relation des étoiles avec les êtres qui l’observent.« l’animal qui court sous les étoiles/le ciel est alors comme un miroir/Où tant de miroirs brisés tu portes l’éclat/reflet de la polaire étoile/tu cherches l’étoile où le secret est enclos ».

Aux tréfonds de la nuit, après avoir exploré transformations de ses ombres personnelles et la recherche de la lumière divine d’amour, le thème de la beauté est appréhendé par une mise en relation avec le poète «  Nous disons qu’un poète est beau » « Si le monde était gouverné par des poètes, il ne serait pas plus beau ». Dans son poème « La beauté », le poète utilise le puissant symbole de la rose. Par plusieurs références, il est fait écho à Antoine de Saint -Exupéry :« L’homme qui était humble et juste ne garda pas la rose pour lui ».

Dans ce premier voyage, le poète nous emmène revisiter des références sacrées, bibliques, mais aussi des grandes plumes de la poésie tout en apportant subtilement ses enseignements. Le poète clôt ce premier volet de façon positive et annonce la suite de ce recueil de poèmes sous l’emblème  "Embrasement". Le ton est donné d’emblée avec l’intitulé « poésie mystique ». Le recours aux légendes en poésie n’est pas sans rappeler Guillaume Apollinaire.

Cette seconde partie du recueil débute avec l’un des quatre éléments : le feu, assimilé à l’esprit de l’amour et l’immortalité avec la métaphore de l’être humain porteur de flambeau. « Et renaître comme brasier », « Feu immortel de l’amour ».

Cette notion d’amour qui consume de l’intérieur fait écho à Arthur Rimbaud « D’un cœur qui aime et ne craint pas d’en brûler » mais ici, le poète envisage aussi le feu comme un danger dont il avertit le lecteur.  « La lumière éclaire mais peut aussi éblouir. », « Je veux jouir jusqu’à ce que le feu me dévore » et la référence au soleil est brillamment usitée. Le lecteur est ainsi invité à questionner la fonction de l’ombre au regard des risques de la lumière. Le poème « Dialogue avec mon ombre » propose une autre vision de l’ombre et des peurs, au regard de l’approche personnelle du poète.

Cela revient à penser au rôle de ce dernier. Il questionne, de façon pertinente, le rôle du poète et de la poésie dans notre monde contemporain « poète berger de tout être » , «  la poésie replace l’humain au centre de sa quête ». 

En naviguant en Grèce Antique, le lien est fait entre poésie et amour « La poésie ne peut naître que d’un cœur qui aime ». Les quelques vers consacrés à Dionysos est un clin d’œil osé au recueil Alcools de Guillaume Apollinaire. « Que peuvent avoir en commun le poète et le mage ? » nous questionne le poète. Le voyage nous invite à interroger le caractère mystique de la poésie et du pouvoir des mots/maux.

L’épopée se poursuit donc avec des légendes traditionnelles « Merlin » « Et ton sang se passerait de Graal pour être bu ! ». Dans son poème « D’Atlantide en Avalon », le poète fait renaître les antiques offrandes. A travers ses visions et ses méditations, il est question de rencontrer et écouter des êtres lumineux, tels que le anges, mais aussi des êtres plus sombres, comme le serpent. Dans son poème « Samhain », le thème de la sorcière est appréhendé de façon positive « Et que nous célébrons le retour des sorcières ».

Enfin, la référence au royaume et l’usage de prières dans ces poèmes permet de raviver le souvenir du poème de Jean de la Croix, où, enflammé d’un amour, il se rapproche du divin. La nuit de l’homme est donc un passage actif et nécessaire, « Transmute ta douleur ô poète » « Seul ne subsiste que l’amour véritable ».

La promesse de Julien Miavril semble ainsi tenue, la lecture de ce recueil de poèmes est une épopée riche en enseignements et en références culturelles.


Julien Miavril, poète, auteur de plusieurs recueils de poésie, La Grande Epopée Cadavralesque (Éd. du Pont de l’Europe), Les féeries profanes (Éd. Stellamaris), D’ombre est mon séjour (Éd. Stellamaris), Feu nu des profondeurs (Éd. du Pont de l’Europe), a également publié deux romans aux éditions Le Lys bleu :Les insurgés stellaires et La sagesse du serpent. Il a reçu le prix international de créativité de la fondation Naji Naaman 2024.

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